Les constructeurs automobiles européens privilégient la Chine au détriment du vieux continent
Selon les résultats d’un rapport publié par l’association Transport & Environment, les constructeurs européens investissent aujourd’hui sept fois plus en Chine qu’en Europe. Une fuite de capitaux « inquiétante » selon l’association qui appelle l’Union Européenne à réagir en fixant des objectifs ambitieux.
Si la production annuelle de voitures en Chine est aujourd’hui 30 % supérieure à celle de l’Europe (23,5 millions de véhicules contre 17 millions en 2017), cette disparité des investissements s’explique principalement par les choix politiques des autorités chinoises qui ont acté la mise en place de quotas dédiés aux véhicules « nouvelles énergies ». L’objectif est ambitieux – 10 % en 2019 puis 12 % en 2020 – et constitue un moteur essentiel pour inciter les constructeurs à accélérer leurs investissements dans l’électrique. Le contraste est frappant par rapport à l’Europe où les modèles électriques ne devraient représenter que 5 à 7 % des ventes d’ici à 2021.
Avec 21,7 milliards d’euros annoncés au cours des douze derniers mois, les investissements liés aux véhicules électriques des constructeurs européens sont sept fois plus élevés en Chine qu’en Europe, où seulement 3,2 milliards d’euros ont été investis sur la même période.
Parmi les investissements les plus ambitieux annoncés sur le sol chinois figure celui de Volkswagen. Le constructeur allemand va engager dix milliards d’euros pour la création d’une nouvelle joint-venture dédiée aux véhicules électriques, avec pour ambition de lancer 80 modèles électriques d’ici à 2025. Arrive ensuite Nissan, qui va investir huit milliards d’euros pour introduire 20 nouveaux modèles en Chine d’ici à 2022.
En comparaison, les investissements sont bien plus modestes en Europe. Renault prévoit par exemple un investissement d’un milliard d’euros dans l’électrification de son outil industriel français.
« Il y a un consensus commun sur le fait que l’industrie automobile va davantage changer dans les cinq prochaines années qu’au cours des 50 dernières années. Le passage aux véhicules électriques, autonomes et partagés a commencé et va transformer le secteur » cite le rapport. L’Europe est également invitée à combler son retard en prenant des décisions politiques fortes, notamment sur les futures réglementations liées aux émissions des voitures et utilitaires légers à l’horizon 2030.
« La Chine parie de manière décisive sur les voitures électriques et gagne la course. Elle a compris que la production suit la demande et que la demande est créée par une politique industrielle intelligente et ambitieuse » a déclaré Julia Poliscanova, responsable véhicules propres au sein de T&E, qui appelle l’Europe à se débarrasser de l’héritage du diesel. Selon la représentante, les ministres européens sont aujourd’hui confrontés à deux choix : « Soit fixer un objectif de ventes de voitures électriques pour conserver les emplois, soit autoriser les constructeurs automobiles européens à continuer à vendre des diesels en investissant leurs bénéfices dans la production de véhicules électriques à l’étranger » analyse-t-elle.
Car la décarbonation de l’automobile est également synonyme d’opportunités en termes d’emplois. A horizon 2030, le développement des énergies alternatives pourrait créer 206 000 emplois nets selon une étude publiée en début d’année par Cambridge Econometrics. Un calcul basé sur un mix de ventes de 25 % de véhicules hybrides, 8 % de véhicules hybrides rechargeables et 15 % de véhicules 100% électriques, les 50 % restants demeurant des modèles à motorisations conventionnelles.
Crédits : Shepherd Zhou. Utuku. Ropi-Rea / Transport & Environment