Un premier projet de décret pour la nouvelle Programmation Pluriannuelle de l’Energie dévoilé
Le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire a présenté son premier projet de décret relatif à la nouvelle Programmation Pluriannuelle de l’Energie. Traduction réglementaire du document présenté fin janvier, il fixe les objectifs de développement du parc automobile électrifié ainsi que le déploiement des infrastructures de recharge. Alors que le texte reprend en partie les objectifs présentés fin janvier, certains points méritent encore d’être éclaircis.
Visant à rendre le « système énergétique plus efficace et plus sobre, plus diversifié et donc plus résilient », la nouvelle PPE présentée fin janvier est l’expression opérationnelle des grandes orientations de l’Etat en matière de transition énergétique pour les périodes 2019-2023 et 2024-2028.
Pour décarboner l’économie et le secteur des transports, le document propose des objectifs chiffrés pour l’électrification des véhicules et le déploiement des nécessaires infrastructures de recharge accessibles au public. Le projet de décret vient confirmer cette vision avec cependant moins de précisions que le texte initial.
Les objectifs d’électrification des véhicules légers conservés mais une précision à apporter sur les poids-lourds
Le projet de décret reprend les objectifs fixés par la nouvelle PPE concernant le nombre de véhicules électriques et hybrides rechargeables en circulation à fin 2023 et fin 2028. A terme, le document vise ainsi un parc roulant de 4,8 millions de voitures particulières électrifiées et 500 000 utilitaires légers électriques et hybrides rechargeables.
Cependant, alors que pour l’ensemble des segments le projet de décret fait précisément la distinction entre motorisations électrique et hybride rechargeable, le texte est moins précis concernant les poids-lourds. En effet, le projet de décret ne parle que de « véhicules lourds à faibles émissions ». Pour rappel, le décret du 11 janvier 2017 définit les véhicules à faibles émissions dont le poids total autorisé en charge excède 3,5 tonnes en fonction du type de carburant utilisé et inclut aussi bien l’électricité que l’hydrogène et le gaz.
En reprenant le projet de la nouvelle PPE, le nombre de poids-lourds électriques immatriculés en France devrait passer de 400 unités en 2023 à 11 000 en 2028, et un objectif à plus long terme visant 30 % des immatriculations en 2050. Pour atteindre ces résultats, le texte s’appuie sur les différents dispositifs d’accompagnement financiers disponibles comme le suramortissement des véhicules lourds électriques et hydrogène mis en place par la loi de finances 2019.
Ainsi, même si les objectifs finaux entre les deux documents sont les mêmes (21 000 poids-lourds en circulation en 2023 et 65 000 en 2028), la répartition entre modèles électriques et GNV n’est plus précisée dans le projet de décret. Il faut ainsi veiller à ce que la part des modèles électriques soit bien identifiée, et ce même si l’article 2 du projet de décret fixe des objectifs de réduction de gaz naturel de – 6 % en 2023 et – 19 % en 2028.
Enfin, le nombre visé de véhicules à hydrogène en circulation n’est plus précisé, alors que le projet de PPE, s’appuyant sur le Plan hydrogène de juin 2018, indiquait 5 000 véhicules utilitaires légers et 200 véhicules lourds en 2023, et entre 20 000 et 50 000 utilitaires légers et 800 à 2 000 poids-lourds en 2028.
Un objectif de points de recharge installés pour 2023 et un champ libre pour 2028
L’article 6 du projet de décret prévoit également des objectifs de déploiement des infrastructures de recharge pour véhicules électriques différents de ceux présenter dans la nouvelle Programmation Pluriannuelle de l’Energie.
Alors que trois scénarios de déploiement d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques étaient présentés fin janvier et visaient jusqu’à 2,2 millions de points de recharge à horizon 2028, cette information pourtant majeure est aujourd’hui absente du projet de décret.
En l’état, avec 100 000 points de recharge prévus en 2023, le projet de décret respecte la directive européenne 2014/94/UE du 22 octobre 2014 sur les carburants alternatifs, soit un point de recharge pour dix véhicules électrifiés en circulation.
En se basant sur des hypothèses reprenant des données anciennes comme l’Enquête nationale transports et déplacement de 2008 et en prenant en compte des véhicules électriques de première génération offrant 200 kilomètres d’autonomie, le projet de PPE visait 2,2 millions de points de recharge lente et accélérée déployés en 2028. Cela aurait alors représenté un point de recharge pour 15 véhicules électrifiés en circulation. L’absence de cette information dans le projet de décret pourrait paraître comme une remise en cause la pertinence des hypothèses initiales et inquiéter sur la vision à long terme pour le développement des infrastructures de recharge, condition essentielle au déploiement de la mobilité électrique.
En effet, en omettant de préciser le nombre de points de recharge électrique visé à terme tout en conservant cette indication pour l’hydrogène, le GPL-c et le GNV, le projet de décret semble faire l’impasse sur le respect de la nécessaire neutralité technologique. A cette fin, la mention de la volonté de respecter le ratio d’un point de charge pour 10 véhicules aurait été un minimum nécessaire.