Les constructeurs automobiles européens s’inquiètent des disparités entre les Etats-membres
Alors que les membres des commissions du Parlement européen s’apprêtent à voter les nouveaux objectifs sur le CO2 proposés par la Commission européenne, l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) vient de publier une étude afin d’alerter sur les disparités constatées entre les différents Etats-membres, tant en termes d’infrastuctures que de financements ou de pouvoirs d’achat.
Comparant les ventes nationales de véhicules électriques au PIB par habitant, l’étude de l’ACEA démontre que la part de marché de l’électrique est proche de 0 % dans les pays où le PIB est inférieur à 18 000 euros. Selon l’association, seuls les pays dont le PIB dépasse les 35 000 euros parviennent à passer les 1,8 % de part de marché sur l’électrique. Une fracture très nette qui divise notamment pays du nord et pays du sud. Les chiffres compilés par l’association démontrent par ailleurs que 85 % des ventes de véhicules électriques se concentrent sur seulement six pays européens.
« Le Parlement européen ne doit pas perdre de vue le fait que le marché est essentiellement porté par les clients » a rappelé Erik Jonnaert, secrétaire général de l’ACEA, soulignant que la transition vers l’électrique ne pourrait se faire sans aborder la question du coût pour l’utilisation.
Alors que la Commission a proposé un objectif de ventes de véhicules électriques de 15 % d’ici 2025 et 30 % d’ici 2030, l’association européenne rappelle que l’électrique n’a représenté que 0,7 % des immatriculations européennes l’an dernier. « Nous sommes inquiets que certains décideurs aient des attentes complètement irréalistes quant au rythme de développement du marché » a déclaré le secrétaire général de l’association.
Le levier des financements
Si l’électrique risque d’avoir beaucoup plus de mal à décoller dans les pays dont le PIB est le plus faible, l’ACEA souligne que les incitations restent un bon levier pour stimuler le marché. L’association prend notamment pour exemple la Suède qui, grâce à la mise en place de nombreux dispositifs de soutien, est parvenue à faire passer la part de marché de l’électrique à 5,2 %. A l’inverse, l’électrique se contente de 0,2 % du marché en Pologne où le gouvernement n’offre aucune incitation.
Une disparité dans les mécanismes de soutien qui inquiète l’ACEA et qui risque de contraindre les constructeurs à accentuer leurs efforts dans les pays les plus propices à adopter la solution électrique. « Afin de compenser ce marché très fragmenté, plus de 50 % de toutes les voitures neuves vendues en Europe de l’Ouest devraient être alimentées par batterie afin d’atteindre un indice de référence moyen de 30 % d’ici 2030, comme le propose la Commission » souligne l’association.
Des infrastructures à développer
Second frein identifié par l’ACEA : la problématique des infrastructures. Si l’Europe dénombre 100.000 points de charge il y a de nouveau un déséquilibre puisque 76 % d’entre eux restent concentrés dans quatre pays européens (Allemagne, France, Angleterre et Pays Bas), ne couvrant que 27 % du continent.
« Les futures réductions de CO2 dépendent fortement des ventes de voitures à motorisations alternatives. Cependant, le changement naturel du marché ne se produira pas sans une meilleure disponibilité de l’infrastructure » alerte l’association.
Dernière problématique évoquée : le manque d’investissements ! Si l’Europe finance déjà l’électromobilité par l’intermédiaire de différents programmes, les Etats-membres sont encore trop peu nombreux à s’engager à leur échelle. « Les investissements doivent être intensifiés, à la fois par les gouvernements nationaux et les opérateurs d’infrastructures » insiste l’association, rappelant les objectifs fixés par la Directive AFI dont la mise en œuvre est jugée « très médiocre ».
« Maintenant, il est grand temps d’agir. Tous les Etats Membres ont la responsabilité de révéler leurs plans et de s’engager à faire les investissements nécessaires » souligne l’ACEA qui appelle l’Europe à montrer aux clients que le réseau d’infrastructures est suffisant pour assurer des déplacements sans anxiété. « En termes simples, si les clients ne voient pas les points de recharge dans leur environnement quotidien, ils ne seront pas prêts à passer à l’électrique » avertit l’ACEA.
Crédits : Elbil / ACEA