Recharge rapide : cinq questions à VINCI Autoroutes
La mobilité électrique se développe et avec elle, le besoin de points de recharge à haute voire très haute puissance, notamment sur les grands axes. Nous avons interrogé Louis du Pasquier, responsable du déploiement des installations de recharge pour véhicules électriques pour VINCI Autoroutes afin d’en savoir davantage sur les ambitions et engagements de l’exploitant autoroutier en la matière.
VINCI Autoroutes affiche son ambition d’équiper massivement ses aires de service en recharge rapide. Où en êtes-vous aujourd’hui et quels sont vos objectifs pour demain ?
Louis du Pasquier : Pour atteindre les objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris, il est nécessaire de décarboner les usages de la route. Pour cela, il faut encourager l’adoption du véhicule électrique à batterie, qui est aujourd’hui la solution la plus mature pour les véhicules légers. Nous avons la conviction chez VINCI Autoroutes que sans une offre de recharge à très haute puissance sur autoroute, permettant de se recharger toutes les 2 heures lors d’une pause de 20 à 30 minutes, les ménages continueront à être propriétaire d’au moins un véhicule thermique, émetteur de CO2 à l’usage, qu’ils continueront à utiliser pour leurs trajets longue distance comme pour leurs trajets quotidiens. Nous déployons donc des bornes de recharge sur notre réseau, sujet sur lequel nous avons été pionniers. Les premières bornes de recharge ont en effet été mises en service dès 2014 et nous avons installé les premiers chargeurs à très haute puissance dès 2018.
Aujourd’hui, plus d’un tiers de nos aires sont équipées de bornes de recharge, nous serons à environ la moitié cet été. Notre objectif est clair : équiper la quasi-totalité des aires de notre réseau d’ici 2023. Cet engagement s’inscrit d’ailleurs dans notre démarche « Ambition Environnement 2030 », dont l’objectif est de transformer nos métiers, nos infrastructures et les façons de voyager de nos clients.
Dans les grandes lignes, pouvez-vous nous expliquer comment se déroule « l’ouverture » d’une station de recharge ; de la prise de décision à la concrétisation matérielle ? C’est un processus qui prend du temps : la première étape est de sélectionner par appel d’offres, comme le prévoit la réglementation française, un opérateur de bornes de recharge, qui construira et exploitera la station de recharge. Cette procédure d’appel d’offres dure environ un an, sachant que l’Etat valide le candidat retenu, une fois que l’Autorité de Régulation des Transports a rendu son avis sur la procédure.
Cet opérateur va ensuite réaliser les travaux de construction nécessaires au déploiement de la station de recharge sur l’aire. Il va en particulier demander au gestionnaire du réseau de distribution d’électricité de réaliser les travaux de raccordement. Ces travaux prennent du temps : de 6 à 8 mois en général. Mais cela peut prendre jusqu’à 2 ans dans les cas les plus difficiles, ce qui à ce jour reste rare heureusement. Pourquoi est-ce si long ? Les stations à très haute puissance que nous souhaitons déployer sur les aires nécessitent une alimentation électrique équivalente à celle d’un gros hameau ou d’un petit village ; ce sont des travaux conséquents.
Il se passe donc environ deux ans entre la décision d’installer des bornes sur une aire et leur mise en service. Afin de gagner du temps et d’accélérer le déploiement des bornes, VINCI Autoroutes travaille en collaboration avec ENEDIS pour anticiper ces travaux de raccordement et les réaliser en parallèle de l’appel d’offres, ce qui nous permet de gagner jusqu’à un an au niveau du déploiement. Nous devrions ainsi équiper la quasi-totalité de nos aires d’ici 2023.
Qu’en sera-t-il de l’accessibilité (notamment en termes de signalétique) et de la disponibilité des bornes de recharge, souvent pointées du doigt par les utilisateurs ?
Il est vrai qu’à ce jour, les points de recharge électrique ne sont pas au cœur des services proposés sur les aires, la grande majorité des usagers de l’autoroute circulant en véhicule thermique. Dans les déploiements en cours, nous travaillons à revoir l’offre complète afin de positionner les bornes de façon optimale sur l’aire. Nous demandons également aux opérateurs d’installer des hauts vents sur les bornes, pour protéger les usagers des intempéries et du soleil. Mais nous souhaitons aller plus loin et sommes actuellement en train de repenser totalement le parcours client : nous réfléchissons à une refonte de la signalétique pour permettre d’accéder au point de recharge le plus naturellement possible. Nous imposons également aux opérateurs une disponibilité minimale de 95% et des délais d’intervention en cas de panne, avec en plus une assistance téléphonique 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Autre point essentiel : les nouvelles bornes seront pourvues de terminaux de carte bleue afin de payer sa recharge à l’acte comme lorsque vous faites le plein d’essence, sans avoir besoin d’une application mobile ou de flasher un QR code.
L’objectif est de devancer la demande de recharge et de montrer aux usagers de l’autoroute que le parcours en électrique sur longue distance est aussi simple et pratique qu’avec un véhicule thermique.
Quid des points de recharge à très haute puissance, soit au-delà de 150 kW ? Il s’agit du point central de notre déploiement : seules des bornes à très haute puissance peuvent permettre une recharge très rapide et donc la mobilité longue distance. Nous demandons aux opérateurs de prévoir a minima 5 points de recharge dont 3 à 150 kW minimum et nous favorisons les offres qui proposent davantage de points de recharge supérieurs à 150 kW. La très haute puissance est déjà une réalité sur nos aires : à titre d’illustration, 10% des bornes IONITY déployées en Europe sont situées sur le réseau VINCI Autoroutes et nous avons déjà 171 points de charge de plus de 150 kW en service sur notre réseau. Naturellement, tout dépend de la capacité des véhicules à accepter la haute puissance. Une Zoé par exemple n’accepte pas plus de 50 kW. Nous prévoyons donc systématiquement des bornes 50 kW en plus, avec les trois prises standards, y compris le CHAdeMO, pour que tous les véhicules trouvent une solution de recharge sur nos aires. Cela permet également aux opérateurs d’offrir un tarif de recharge moins élevé pour ceux qui restent plus longtemps sur les aires ou n’ont besoin que d’un complément de recharge.
Vous annonciez voilà quelques semaines qu’Ulys, votre application de télépéage, recensait 33 000 points de recharge accessibles au public. Est-il prévu d’autres fonctionnalités pour rendre service aux conducteurs de véhicules électriques et hybrides rechargeables ?
Dans la logique d’un parcours client simplifié, Ulys propose déjà de nombreuses fonctionnalités pour la mobilité électrique : outre ces 33 000 points de recharge recensés, qui peuvent être filtrés par connecteur, par puissance etc., il existe également dans l’application une fonction itinéraire en véhicule électrique permettant d’identifier les stations de recharge sur son trajet, avec les informations en temps réel sur leur disponibilité, les types de connecteurs, les puissances proposées… Ulys permet également de s’informer sur la présence des stations de recharge sur les aires de service. Et dès la fin de cette année, il sera également possible de payer sa recharge de véhicule électrique avec l’application Ulys, pour simplifier encore l’expérience client de l’usager !
Nous allons en outre refondre le site VINCI Autoroutes à l’été en mettant la mobilité électrique au cœur des informations mises à disposition des usagers de nos réseaux.