Un arrêté vient complexifier l’installation de points de charge pour les bus électriques
L’arrêté du 3 août 2018, publié le 14 août au Journal Officiel, définit de nouvelles règles pour l’installation de bornes de recharge dans les dépôts de bus électriques. Alors que le texte allège les demandes administratives, il oblige les propriétaires des lieux à installer des systèmes de sécurité exigeants, tant en coûts qu’en espace foncier.
A la demande de la Direction Générale de la Prévention des Risques, le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire a publié un arrêté afin d’adapter celui du 29 mai 2000 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2925 et ainsi définir les règles concernant l’installation de points de charge au dépôt pour les bus électriques.
Ce texte concerne les ateliers de charge pouvant accueillir au moins dix bus électriques de catégories M2 et M3 et soumis à la réglementation n° 2925 « accumulateurs » de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement. L’arrêté vaut également pour les « installations classées soumises à déclaration incluses dans un établissement qui comporte au moins une installation soumise au régime de l’autorisation dès lors que ces installations ne sont pas régies par l’arrêté préfectoral d’autorisation ».
Le texte définit ainsi avec précision l’aire de charge, qui comprend la zone de l’atelier où sont branchés les véhicules et le premier organe de protection électrique permettant d’arrêter la recharge.
Des obligations différentes selon le lieu d’implantation
L’arrêté s’applique à toutes les infrastructures de recharge déployées depuis le 15 août 2018 et rend obligatoire l’installation de systèmes de sécurité coûteux, aussi bien en argent qu’en espace.
Ainsi, de nouvelles prescriptions de conception et de fonctionnement des ateliers de charge sont requises. De plus, les obligations diffèrent selon que les infrastructures de recharge soient situées à l’air libre ou dans un bâtiment surmonté ou non par des locaux habités ou occupés par des tiers.
Par exemple, si le bâtiment n’est pas surmonté de locaux occupés, ou bien si l’infrastructure de recharge se situe à l’air libre, l’aire de recharge doit être implantée à une distance d’au moins 15 mètres des limites de l’établissement. Cette distance peut être réduite à 12 mètres si l’exploitant du dépôt démontre que l’incendie d’un véhicule, initié hors batteries, ne peut enflammer l’une de ses batteries.
Si l’exploitant ne peut répondre à cette obligation, des solutions de substitution peuvent être mise en place telle l’installation de parois coupe-feu (dont la hauteur est calculée en fonction de la distance au sol et de la hauteur de l’immeuble, voir tableau) entre l’aire de recharge et les tiers, éventuellement couplée avec un système d’extinction automatique d’incendie de type sprinklage.
Dans le cas où l’atelier de recharge est surmonté de locaux occupés par des tiers, les exigences sont plus strictes avec par exemple la mise en place de parois coupe-feu spécifiques.
Des règles pouvant compromettre le développement des bus à faibles émissions
Dans tous les cas, l’aire de charge doit être isolée de nombreux équipements. Elle doit ainsi être installée à plus de 9 mètres d’installations de remplissage ou de distribution de gaz à inflammables liquéfiées, 10 mètres du poste de surveillance et des locaux accueillant les pompes approvisionnant le système d’extinction d’incendie et à peine de 14 mètres des stations de distribution d’hydrogène. A défaut, l’exploitant du dépôt peut mettre en place une paroi présentant une tenue au feu de type EI 60 ou REI 60 si celle-ci constitue un mur porteur. Cette distance semble malheureusement disproportionnée au regard des autres carburants : en effet, la distance usuelle est de 5 mètres pour les stations-services.
Le décret exige également l’installation d’un poste de surveillance, non obligatoire pour les autres carburants, situé à proximité du point d’accès des secours, disposant à la fois d’un dispositif de coupure générale de l’ensemble des alimentations électriques de l’installation et d’un moyen permettant d’alerter les services de secours.
Pour Joseph Beretta, Président de l’Avere-France, toutes ces nouvelles dispositions portent atteinte au principe de neutralité technologique : « Les obligations de sécurité s’appliquant aux ateliers de charge ne doivent pas être plus exigeantes que pour le diesel, le gaz naturel compressé ou liquide, d’autant plus que ces énergies sont en France plus émettrices de gaz à effet de serre ».
Alors qu’aujourd’hui, l’adaptation des dépôts existants est une contrainte pour les opérateurs et les autorités de transport souhaitant accueillir des bus électriques, la mise en œuvre des obligations découlant du décret risque d’engendrer des coûts supplémentaires élevés risquant de remettre en question l’adoption des véhicules à faibles émissions, malgré les obligations de renouvellement inscrites dans la Loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015. « Il est capital que ce projet d’arrêté garantisse la sécurité des biens et des personnes sans entrainer de retours en arrière du fait de sa complexité de mise en œuvre, des surcoûts liés et du faible nombre de zones de stockage disponibles » précise Joseph Beretta.
Crédits : RATP